çà va Monsieur ? Suite, mais pas fin...

Démarré par Jim, 18 Décembre 2009 à 18:25:38

hurt

#30
Bonjour Jim. Ca te fera un peu de lecture. :wink:
Le 9 novembre 2008 ma chérie tombe dans les escaliers de la cave chez des gens qu'on ne connaît pas. Treiz est avec moi. Je ne lui serai jamais assez reconnaissant. Heureusement, il travaille en ambulance. Pliée en deux en bas des escaliers hurlant de douleur, on devine vite une lésion au niveau du dos, voire d'autres fractures. Elle a très mal aux jambes, ne sait plus les bouger et ne sent rien quand on les touche. Le samu arrive: oxygène et trois perfusions: médrol, antidouleur et anti nauséeux car ils ne savent pas s'ils vont la sortir la tête en bas ou en haut. Une heure trente pour la sortir de la cave car couloirs très étroits et pleins de coins, puis il a fallu la sangler dans une coque solide.
Arrivée aux urgences: par bonheur deux des meilleurs neurochirurgiens sont de garde. Ont la met sous morphine. Une infirmière rugbywoman coupe son pantalon et l'engueule parce qu'elle est douillette.  Entre temps mes fils et leur compagne sont arrivés. Les femmes nous empêchent d'aller faire la grosse tête à la rugbywoman. Ma chérie va faire une radio mais on lui redonne une dose de morphine. Résultat: fracture de la douzième dorsale avec lésion de moelle. Pour les jambes, on n'a pas fait de radio. Toutes les vingt minutes, on lui redonne de la morphine. Le neuro arrive: le 9 est un samedi, le 10 un dimanche, le 11 c'est férié, on l'opère le 12. J'insiste, dis que ce n'est pas possible, qu'il va y avoir des problèmes pour la gestion de la douleur à raison d'une dose de morphine toutes les vingt minutes. Quid des possibilités d'hémorragies internes? Quid de possibles fractures aux jambes? Le neuro s'en va et  revient une demie heure plus tard: ok on l'opère cette nuit. Ouf.
Je l'accompagne au bloc en passant par le scanner: là, j'entends jurer, merde il est en panne, on va prendre l'autre, merde lui aussi en panne. Elle sort du scanner pour aller au bloc. Je demande s'ils ont toutes les infos pour l'ouvrir. Réponse: oui, on va faire avec. Pendant les deux heures trente d'opération je retourne chez moi chercher quelques lingeries. A minuit elle ouvre les yeux aux soins intensifs. Pas de neuro, pas d'infos. Je la laisse, ma présence étant interdite dans ce secteur et visite uniquement à 1h30. Le lendemain à l'heure dite je suis là. Elle n'est plus au soin intensif mais en neuro. Ok. Je la trouve alitée avec un corset. Je vois le neuro: il a mis deux vis dans la vertèbre cassée pour que les miettes d'os qui se trouvent à l'avant puissent s'accrocher en se recalcifiant. Il a placé aussi une plaque de titane entre la 11ème et la 13ème vertèbre pour soutenir la douzième. Elle est couchée à plat et ne peut bouger. On lui a mis une sonde urinaire car les sphincters sont bloqués. C'est férié, je peux rester pour lui donner à manger. Elle a tjrs très mal au pieds et aux jambes. Mais quand on les touche, les pince, les chatouille, elle ne sent rien. Question: y a t-il des fractures? Réponse : on ne sait pas. On cherche. Le 11, c'est férié: je suis là à 7 heures pour lui donner à manger. Les douleurs aux pieds et aux jambes sont de plus en plus fortes. Je fais venir mon frère médecin. Avec toutes sortes de trucs, il la touche, la manipule: résultats; douleurs neuropathiques ( mal du cul de jatte), c'est la moelle lésée qui provoque ces douleurs. ; pas de fracture. C'est férié, personnel réduit, c'est moi qui vide le sac de la sonde urinaire.
Mardi 12 à 7 heures, elle me téléphone. Elle ne sait pas manger. J'y vais. Je la trouve couchée sur le dos avec le plateau repas au dessus d'elle. Elle voit même pas ce qu'il y a sur le plateau. Je lui donne à manger. Le chef de salle arrive et veut que je parte. Je refuse obstinément et me fait calmement comprendre: je serai là à chaque repas puis m'en irai sauf pendant les heures de visite. Elle est en chambre à deux lits car les chambres à un lit sont réservées depuis longtemps.
L'après midi je vois le neuro: il me montre le travail qu'il a fait. Je lui dis que ses douleurs aux jambes sont des douleurs neuropathiques. Il me répond qu'il le savait. Je le remercie gentiment de ne me pas l'avoir dit. Je lui demande quel traitement il compte mettre en oeuvre pour ces douleurs.Il va prescrire du lyrica. OK. Elle reste dans cet hôpital trois semaines. Peu à peu on parvient à améliorer un peu son confort. Mais les injonctions sont contradictoires: elle peut pas bouger, oui elle peut se retourner, non elle ne peut pas se redresser, oui elle peut se redresser. Très important: je dois être là et jeter un oeil à tout. La poche est pleine, faut la vider, elle n'a pas reçu son lyrica de midi, la pompe à morphine est vide, lui mettre la panne, lui donner à boire car son canard est inaccessible. Toutes sortes de trucs, de petits détails. Quand je demande si elle pourra remarcher, c'est tjrs la meme réponse: sais pas, vous savez, elle revient de loin. Et uriner? Sais pas, vous savez elle revient de loin....
Ce que je retiens de son séjour dans cet hôpital gigantesque: un manque cruel de personnel, pas de communication  entre le neuro et son patient si tu ne la cherches pas, lit et chambre pas adaptés à ce type de pathologie.
Après trois semaines de ce régime elle est enfin transférée dans un petit hôpital près de chez moi pour sa revalidation. Ouf. L'hôpital est vieillot, on en construit un neuf juste à côté. Mais quel bonheur: lit et chambre adaptés, 1 infirmière pour quatre patients. Baignoires et douches adaptés. Accueil et communication impec. On lui retire sa sonde. Par bonheur, aucune infection. On la sonde six fois par jour. Khiné et ergo trois fois par jour plus piscine. Je m'installe, l'installe, ça devient notre chez nous. Petit à petit elle s'assied, se met debout, se retourne seule dans le lit. On lui lave enfin les cheveux, elle prend un bon bain. Elle apprend à passer du lit à la chaise roulante et vice versa. Comme on lui a retiré sa sonde, je la conduit aux toilettes, mais rien nada. Jusqu'au jour où j'entends quelques gouttes de pipi couler. J'appelle tout le monde, c'est la fête. C'est encore un peu tôt pour être sur. Mais bon c'est bien parti. Quand elle urine pour de bon c'est champagne pour tout le monde. Et ainsi pendant cinq mois. Puis c'est retour maison.J'ai adapté la douche, mis des rampes supplémentaires dans les endroits dangereux. Elle va quatre fois semaine à l'hôpital pour faire de la khiné et de l'ergo. On muscle les bras pour les béquilles, les cuisses et les mollets pour les escaliers, la marche. Un jour, je l'installe dans la voiture. On essaye. Ca marche, elle conduit. Problème avec l'embrayage, mais bon, c'est bien parti.
Jour après jour, cm après cm, elle avance.
Bon, ce ne sera plus jamais comme avant, mais elle est autonome pour pas mal de trucs. Il y a des choses qu'elle ne pourra plus jamais faire. Mais elle est en vie.
Dur dur. Elle s'est retrouvée avec mon oiseau lyre dans ce petit hôpital. Elle y était en externe pour vivre au mieux ce qui lui restait à vivre.  Elle se sont rapprochées et aimées. L'une soutenant l'autre. Ce sont les hasards de la vie. Il n'y rien à faire contre çà. En profiter et faire de ces moments des moments de bonheur inoubliables, de complicité et d'intimité très riches et très profonds.
Voilà l'ami. Je pense bien à toi. L'avenir est devant nous et ce jour est le premier de ceux qui nous restent à vivre. Alors, on va pas le gâcher. Vrai? :super: :super: :super:
T'es dans la solution ou dans le problème?

don_rico

Tout bien que tu détiens est un soucis qui te retient...

sushi

A tous, vous nous donnez des leçons de courage.
Nous devons nous en inspirer.

Mais certaines choses resteront malgré tout difficile à gérer,
comme un coup de téléphone au milieu de la nuit...
Bras Cassés Power !!!

hurt

Citation de: sushi le 22 Décembre 2009 à 10:45:32
A tous, vous nous donnez des leçons de courage.
Nous devons nous en inspirer.

Mais certaines choses resteront malgré tout difficile à gérer,
comme un coup de téléphone au milieu de la nuit...

Tu l'as dit. L'angoisse d'un coup de fil après 22 heures.........Je ne suis pas tendre pour la personne qui me tél après cette heure là. Tu prends le cornet en tremblant, tu dis un allo anxieux, et tu espères que c'est pour une connerie. Elbenobi s'est crashé en Bar il y a quelques années, et depuis lors, je ne supporte plus les coups de fils en soirée. Sans compter qu'on est souvent sur les dents quand on a des gens malades ou à l'hosto dans ses proches.
T'es dans la solution ou dans le problème?

Baloo

La camionette de Gendarmerie c'est pas mal non plus, quand tu es à la maison en train d'attendre...
Carbone et Duffle en font une belle...

Seb

Je roule pas trop vite, je vole trop bas

guillaumev

Citation de: hurt le 22 Décembre 2009 à 10:15:38
[...]
L'avenir est devant nous et ce jour est le premier de ceux qui nous restent à vivre. Alors, on va pas le gâcher. Vrai?
[...]

Rien que ça, c'est une grande leçon de vie!

Il faut que je me la note dans un coin et que je la sorte à l'occasion. C'est très beau. :-)
Vive le 2.0 8)

hurt

Comme je viens de le dire à Tapion, pouvoir se soutenir l'un l'autre, même si on s'est jamais vu, ça fait du bien et il n'y a pas de mal à être gentil. Et puis on se rend compte qu'on n'est pas seul dans le même cas. Et j'ajoutais que pouvoir l'écrire, pouvoir écrire ces mots si longtemps retenus, c'est égoïstement une vraie thérapie libératrice. Donc c'est moi qui remercie Tall et vous tous.
On n'a pas encore une vanne de Jim. J'espère qu'il a la pêche.
T'es dans la solution ou dans le problème?

Jim

Citation de: hurt le 22 Décembre 2009 à 12:31:05
Comme je viens de le dire à Tapion, pouvoir se soutenir l'un l'autre, même si on s'est jamais vu, ça fait du bien et il n'y a pas de mal à être gentil. Et puis on se rend compte qu'on n'est pas seul dans le même cas. Et j'ajoutais que pouvoir l'écrire, pouvoir écrire ces mots si longtemps retenus, c'est égoïstement une vraie thérapie libératrice. Donc c'est moi qui remercie Tall et vous tous.
On n'a pas encore une vanne de Jim. J'espère qu'il a la pêche.

Merci Hurt, tu as bien résumé mes sentiments...

- Merci à tous les TALLISTES  de leurs petits mots qui comme le dit Hurt, prennent une grande importance et sont d'un plus grand réconfort qu'il n'y paraît.  :applause:
Car dans mon cas ; la réaction que je devine chez les non motards, c'est :
- "un accident de moto, çà devait arriver un jour ou l'autre..."  et autres devises moralisatrice de faux cul de base.
Et dès ce moment, c'est incroyable comme leur regards changent :
- "Va t'il s'en sortir ?...comment ?..."
Bref autant de réflexions entendues par tiers interposé, lues sur les visages,  qui font de vous une DOUBLE victime, mais à qui on ne pardonne rien.
Autrement dit, avec un risque de handicap, vous vous retrouvez du jour au lendemain, mis rapidement au banc de la Société, vous savez ce système à demander toujours plus toujours plus vite, et qui préfère payer et continuer à ignorer que d'intégrer...



Nous voulons des coquelicots// https://nousvoulonsdescoquelicots.org/

sushi

Tu as bien raison Jim.
Il n'y a pas si longtemps, je suis intervenu sur un accident entre une voiture et un motard.
Déjà, de voir le motard au sol, ça m'a fait quelque chose qui m'a obligé à m'arrêter,
et ensuite en écoutant les gens en voiture, c'était pas leur faute, le motard roulait trop vite.
Sauf que quand on a regardé les traces de freinage avec la police  :siffle:
Quand on a vu où se situait l'impact sur la voiture  :siffle:
Quand on a vu que le type est tombé juste en bas de la moto après le choc  :siffle:

Si il était arrivé trop vite, il aurait fait un super vol plané.
Mais le fait d'être motard, donne un bon moyen de "défense" aux "automobilistes", continuant ainsi à perpétuer une mauvaise image du motard.
Bras Cassés Power !!!

hurt

#40
Qu'ouis-je? Que lis-je? Peut me chaud ma réputation. Tu roules vite, tu te plantes, tu roules trop lentement tu te plantes. Beaucoup de Baristes nous envient au fond d'eux mêmes. Que nous importe le regard qu'ils portent sur nous. Puis chez les motards aussi il y a des fêlés. En voilà un qui te fait signe, coucou salut l'ami, une demie heure après il s'amène derrière toi, te passe et vient  faire son freinage de tapé à 1m de toi juste avant le beau tournant que tu t'apprêtais à entamer.  Baah, roule l'ami, fais ton chemin et qu'il soit le plus long possible. Je ne suis qu'un motocycliste sans prétention qui par tous les temps va au boulot avec son trois pattes. Et quand je roule le samedi  ou le dimanche ( le dimanche c'est rare) c'est juste pour errer. Je n'ai rien à prouver, rien qu'à être.

Au village, sans prétention,
J'ai mauvaise réputation.
Qu' je m' démène ou qu' je reste coit,
Je pass' pour un je-ne-sais-quoi!
Je ne fais pourtant de tort à personne
En suivant mon ch'min de petit bonhomme.
Mais les brav's gens n'aiment pas que
L'on suive une autre route qu'eux,
Tout le monde médit de moi,
Sauf les muets, ça va de soi.

T'es dans la solution ou dans le problème?

sushi

Faudrait créer un topic "le Cercle des Poètes de Tall"  :mrgreen:
Bras Cassés Power !!!

guillaumev

Vive le 2.0 8)

Virolo


Misterno

Caisseu  par contraintes tan piche mauriche